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du journal La Montagne publié le 27/10/2021 à 08h43
Le pôle oncologie du centre hospitalier de Brive, a dû se réorganiser face à l’afflux de nouveaux patients.
Après les confinements et les retards qu’ils ont causés dans le dépistage des cancers, le service briviste voit arriver de plus en plus de patients avec des pathologies graves.
C’est une hausse continue, comme lorsque le niveau de l’eau monte lentement, mais sûrement, et qu’il ne semble pas vouloir marquer de pause. ” Le phénomène a commencé avant l’été. Nous avons été obligés de nous réorganiser face à l’afflux de ces nouveaux malades, mais nous sommes à flux tendu”, détaille le docteur Laure Vayre.
La responsable du service oncologie du centre hospitalier semble un peu désemparée :
Les pathologies sont les mêmes, mais elles sont à un stade plus avancé, davantage métastatique. Parfois, nous n’avons même pas le temps de démarrer un traitement.
L’onde de choc engendrée par la crise sanitaire du Covid-19 n’en finit pas de bouleverser le quotidien de ce service spécialisé dans le suivi et le traitement des cancers.
12,7 % de patients en plus en chimio ou immunothérapie
Le constat est national : les différents confinements ont provoqué des retards importants dans les dépistages, et donc les diagnostics et la mise en place de traitements.
Ce décalage se lit dans les chiffres : sur les huit premiers mois de 2019, donc avant le Covid-19, 1.140 personnes suivaient un traitement par chimiothérapie ou immunothérapie dans le service briviste ; sur la même période de 2021, ils sont 1.306, une augmentation de 12,7 %. “Et l’écart ne cesse d’augmenter”, commente le docteur Vayre.
Le temps est un facteur déterminant pour la prise en charge d’un cancer. Plus les tumeurs sont importantes au moment du diagnostic, et moins le pronostic est optimiste.
Contre le cancer du sein, l’hôpital de Tulle (Corrèze) joue la carte de la prévention
“Les traitements sont plus lourds et l’espérance de vie plus courte”, dit, autrement, le docteur Vayre. Ses équipes ne sont plus surprises de voir arriver des patients de moins de 50 ans, avec des cellules d’un cancer primaire qui ont migré dans une autre partie du corps.
Le personnel soignant travaille à flux tendu, selon la responsable du service.
Très sollicité, le personnel soignant multiplie les heures supplémentaires et renouvelle la stratégie adoptée lors du premier confinement : davantage d’hospitalisations à domicile “quand c’est possible”.
Chacun espère que le retour à la normale du taux de dépistage, par exemple pour le cancer du sein, va permettre de stabiliser la situation : au premier semestre 2021, 6.659 personnes ont bénéficié d’un examen préventif en Corrèze, contre 3.756 sur la même période de 2020. “La communication est primordiale, insiste le docteur Vayre. Il ne faut pas avoir peur de se faire dépister, d’aller voir son médecin.”
Impact psychologique du premier confinement
La crise du Covid est toujours là, mais au sein du service oncologie, les visites sont permises (avec pass sanitaire). Rien à voir avec la situation du premier confinement, au printemps 2020 : peu ou pas de sortie de la chambre, aucune activité annexe (balnéo, esthéticienne, biographe…).
“Nous étions obligés de maintenir ces contraintes, le cancer et le Covid n’étant pas compatibles, assure le docteur Vayre. L’équipe soignante est restée très à l’écoute, en relayant les appels téléphoniques des proches, en faisant le relais pour distribuer les paquets déposés dans un sas, à l’entrée du service.”
Cette période a cependant eu un impact psychologique fort sur les patients et sur le personnel soignant. En l’évoquant, le docteur Vayre a du mal à cacher son émotion : “C’était terrible. Nous avons essayé de faire le maximum pour garder le contact avec les patients qui n’étaient pas hospitalisés, par exemple avec la téléconsultation. Heureusement, il y a aussi de belles histoires”, celles qu’on garde pour soi et qui donnent un sens dans la lutte contre le cancer.
Eric Porte